Le Nouvel Observateur, 16 décembre 2004
Les Égyptiens avaient remarqué la grosseur et la saveur des foies des oies sauvages qui se gavaient naturellement en prévision de leur longue migration hivernale. La décoration de tombeaux de l'Ancien Empire atteste de la présence d'oiseaux nourris par des esclaves. Mais rien ne prouve que ce ne fût pas pour pour leur viande. Les Grecs engraissaient les oies avec de l'avoine trempée dans l'eau. Puis les Romains vanteront les mérites du foie gras gavée aux figues. Celui-ci donnera même son nom au foie, le latin jecur ficatum (le foie de figues) devenant ficatum, puis figido, fedie, feie et foie. La chute de l'Empire romain sonne le glas de ce mets raffiné dont la trace se perd. La paternité du foie gras moderne reste disputée. Les Juifs d'Europe centrale revendiquent le savoir-faire des Alsaciens. Les paysans du Sud-Ouest attribuent aux Wisigoths la technique du gavage des oies et à Christophe Colomb l'introduction du maïs, qui a remplacé les figues, venu d'Amérique centrale. Tous doivent beaucoup à l'invention de la conserve par Nicolas Appert, au début du XIXe siècle, époque qui consacre le foie gras chanté par Rossini, auteur d'opéras-bouffes et du fameux tournedos. ■ Vincent Tolédano
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