TéléCinéObs, 27 janvier 2005
50 millions de femmes manquent en Inde, à cause de la discrimination sexuelle qui fait qu'on les tue, qu'on les abandonne ou qu'on les maltraite dès leur naissance. C'est quasiment la population de la France! Vous vous rendez compte de ce que ces absentes auraient pu apporter. D'un point de vue psychologique, émotionnel, un garçon ne se construit pas de la même manière sans filles à ses côtés. Un monde sans femmes est handicapé, amputé. Je suis convaincu que mon pays, d'une culture si riche, reste pauvre, corrompu et injuste parce que la moitié de sa population n'a pas la chance de contribuer à son évolution. ■ Propos de Manish Jha, cinéaste, recueillis par Véronique Le Bris, au sujet de son film, Matrubhoomi, un monde sans femmes
Si vous enseignez à un homme,
vous enseignez à une personne.Si vous enseignez à une femme,
vous enseignez à toute une famille.Proverbe indien
Courrier international, 10 février 2005
Votre femme a fait son temps? Vendez-la!
De Kadapa
Dans la caste des yerukala, les hommes de la secte pinchapuri ne peuvent se contenter d’une seule femme. Chez eux, la bigamie, voire la polygamie, est monnaie courante. Mais ce n’est pas tout. L’homme pinchapuri, qui a parfois jusqu’à cinq femmes, se lasse rapidement de ses compagnes. Quand l’une d’elles ne lui plaît plus, il la met en vente. Que les féministes se rassurent, la femme a tout de même son mot à dire. Si l’acheteur ne lui convient pas, elle peut toujours refuser et l’on en reste là.
Echangistes ou accros du shopping ? Les propos de Subbaaiah suscitent stupéfaction et consternation: “J’ai vendu ma première femme pour 18 000 roupies [environ 323 euros]: elle n’était pas assez belle. Mais j’ai déboursé 58 000 roupies pour m’en acheter deux autres.”
Et il ne compte pas en rester là. Subbaaiah a l’intention d’en revendre une pour s’en payer une nouvelle. Comme lui, presque tous les hommes pinchapuri s’adonnent à cette frénésie de consommation. Les femmes n’ont pas l’air de s’en offusquer. Il faut dire que c’est la seule vie qu’elles connaissent.
La rationalisation de ce commerce a de quoi faire frémir. Dans cette communauté de 5000 personnes, les hommes changent de femme comme d’autres changent de voiture. Ce n’est ni un crime ni un tabou, mais un moyen d’empêcher l’adultère.
“Si un homme aime la femme d’un autre et que c’est réciproque, nous leur permettons de devenir mari et femme une fois l’affaire conclue. C’est le meilleur moyen d’éviter les aventures extraconjugales. La vente a lieu en présence de médiateurs et du chef de la caste, mais la femme doit avoir donné son accord préalable. Sinon, la vente ne se fait pas”, explique Subbaaiah.
Ce commerce a été pensé dans les moindres détails. Les enfants vivent avec leur mère et leur beau-père, mais le père biologique demeure leur propriétaire. En réalité, une fois qu’un homme a vendu sa femme, il se fiche comme d’une guigne de sa progéniture. Ces derniers doivent donc se débrouiller et se mettent à mendier, parfois dès l’âge de 5-6 ans, pour nourrir leurs aînés. Les adolescents élèvent des porcs ou aident leurs parents à fabriquer des balais, occupation ancestrale de cette secte.
Ils se rendent à Bombay, Pune et Bangalore pour vendre le produit de leur artisanat. Cette communauté vit dans l’Andhra Pradesh, entre Jammalamadugu, Mydukur, Badvel et Porumanilla.
Les femmes et les enfants travaillent dur, mais les hommes dépensent tout l’argent du ménage pour s’acheter des femmes ou de l’alcool. Comment les intéressées vivent-elles cette situation ? “Personne ne nous force à quoi ce que ce soit”, explique Laxmamma, récemment achetée comme quatrième épouse. Quid du regard du reste de la société? “Nous nous en fichons. Nous sommes libres et indépendants.” ■ <Expressindia.com>
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