Le Matin dimanche, 17 avril 2005
BIEN-ÊTRE • Le classique a perdu le monopole de la musique qui soigne les douleurs
[...] On savait depuis longtemps que la musique classique avait des vertus relaxantes. On vient de découvrir qu'écouter un CD de hard rock ou de rap peut avoir le même effet curatif.
Deux psychologues anglais viennent en effet d'en apporter la preuve. Écouter la musique que l'on aime aide à surmonter la douleur et diminue le degré d'anxiété. Comment sont-ils arrivés à cette conclusion? Les Drs Laura Mitchell et Raymond MacDonald ont convoqué quarante-quatre personnes à une «séance de torture» (plonger la main dans un bac d'eau glacée) dans un laboratoire de la Glasgow Caledonian University.
Mais ces cobayes ne sont pas arrivés les mains vides. Comme susucre, les psychologues leur avaient demandé d'apporter le morceau de musique de leur choix pour égayer le supplice. En vrac, les cobayes ont choisi Avril Lavigne, the Verve, Norah Jones, Nirvana, Francis Cabrel, Vivaldi, Dido, St Germain, Eminem, Enrique Iglesias.
Et le résultat a été concluant, puisque cet environnement sonore leur a permis d'endurer la douleur beaucoup plus longtemps que les cobayes soumis à d'autres distractions, telles que regarder des sketches à la télévision ou faire du calcul mental.
Prodigy plus efficace que Vivaldi«Le choix le plus surprenant était un morceau du groupe Prodigy. Ce n'est pas la musique qui vient immédiatement à l'esprit quand on pense à se relaxer, accorde le Dr Mitchell. Pourtant la personne qui écoutait ce morceau a gardé sa main dans l'eau glacée cinq fois plus longtemps que les autres.»
La raison de l'efficacité de la musique n'est pas déterminée. Il se pourrait que l'effet soit dû au fait que la musique ne passe pas par le mental. «Quand un morceau captive quelqu'un, il aide à mieux supporter la douleur parce que l'esprit s'évade et qu'il ne pense plus à sa souffrance», explique Serge Ventura, directeur de l'École romande de musicothérapie.
Cet étonnant résultat ne surprend pourtant pas Antoinette Martin, musicothérapeute genevoise. «Pour aider une personne momentanément inquiète ou qui souffre physiquement, on lui propose la musique qui lui est chère. Le résultat est immédiatement positif. Mais il s'agit dans ce cas d'une situation ponctuelle. Par exemple, avant des soins dentaires ou lors d'angoisse durant un vol d'avion. En revanche, pour traiter un trouble anxieux chronique ou récurrent, cette méthode ne suffira pas.»
Cela explique sûrement pourquoi les accros du fitness ont souvent un baladeur vissé sur les oreilles. Écouter de la bonne musique permet de faire quelques kilomètres de plus sur l'instrument de torture qu'est le vélo ou le tapis de course...
Nolwenn a la voix qui guéritAjoutons enfin, pour convaincre les derniers sceptiques, que les chercheurs écossais ne sont pas les seuls à vanter les vertus curatives de la musique pop.
Frederick Carrick, spécialiste américain en neurochirurgie, avait déjà prôné les effets bénéfiques de la voix de Nolween Leroy sur ses patients. À tel point que, lors de ses séances de musicothérapie, il a remplacé Mozart par la gagnante de la deuxième édition de la «Star Academy».
Il lui aurait d'ailleurs fait une telle pub, à la fin de l'année dernière, que des centaines de praticiens utiliseraient le même moyen pour des thérapies de lésions cérébrales. Et, grâce à cela, la notoriété de Nolwenn a explosé aux États-Unis. Les ventes de son album ont décollé sur le site Amazon.com.
■ Mélanie Blanc
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