Le Nouvel Observateur, 3 avril 2003
[Dans la «guerre dissymétrique» les deux adversaires appliquent les mêmes règles de combat mais l’un] des combattants recherche une supériorité qualitative et/ou quantitative pour l’emporter. Un exemple typique de la «guerre dissymétrique» est l’utilisation par les États-Unis de la bombe atomique à Hiroshima, le 6 août 1945, le Japon ne disposant pas de cette arme. Un autre exemple est fourni par la guerre du Golfe de 1991, où les moyens militaires des deux camps étaient à peu près de même nature mais où leurs performances donnaient une supériorité indéniable à la coalition arabo-occidentale.
[Dans la «guerre asymétrique»,] il s’agit de refuser les règles de combat imposées par l’adversaire, rendant ainsi toutes les opérations totalement imprévisibles.
Cela suppose à la fois l’utilisation de forces non conventionnelles, insoupçonnables (civils, miliciens); le recours à des méthodes - guérilla, terrorisme - antinomiques de celles de la guerre classique; l’emploi d’armes rustiques contre lesquelles les armes de haute technologie ne sont pas d’un grand secours; le choix de lieux d’affrontements aléatoires (centres des villes, établissements publics, scolaires ou religieux...) et surtout l’emploi de l’effet de surprise - cette dernière caractéristique étant la plus importante.
Si la «guerre dissymétrique» reste l’apanage des puissants, la «guerre asymétrique» peut être considérée comme «l’arme du pauvre» dans la mesure où elle permet à de multiples acteurs qui ne disposent que de moyens limités d’avoir une capacité de nuisance totalement disproportionnée.
Les guerres et les batailles «asymétriques» sont légion dans l’histoire des conflits. Les exemples foisonnent. Gengis Khan doit son succès au recours à la cavalerie, associée à l’emploi des arcs, qui permettaient d’éviter au maximum le contact avec l’adversaire lors d’assauts multiples et rapides, suivis d’une esquive aussi rapide. Les combattants afghans, lors de la guerre contre les Soviétiques, sont parvenus, à force de volonté et de stratagèmes en cascade, à entraîner leurs ennemis sur des terrains défavorables, à renverser le cours de la guerre et à remporter finalement la victoire. Napoléon, enfin, lors de la campagne de Russie, où ses forces et sa logistique étaient harcelées par les hordes de Cosaques, dut se résigner à accepter la déroute, sur un terrain hostile que ses soldats ne connaissaient pas.
[L’instauration d’une asymétrie qui lui donnerait l’avantage sur son adversaire] fut l’option adoptée par les Britanniques lors de la deuxième guerre des Boers, entre 1899 et 1902. [...] ■ Général Michel Roquejeoffre (CR)


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