Courrier international, 8 juin 2007
[Le mensuel américain In These Times, résolument opposé à la guerre en Irak, estime que le
Pentagone
[Ptgn] exploite l'immaturité des
adolescents
[PsyInfirm] en recrutant sur les campus et dans les lycées.] Sur 1 million de militaires d'active ou de
réserve, près de 600 000 se sont engagés à l'adolescence. L'armée
attire ces individus physiologiquement immatures grâce à une machine de
relations publiques qui ferait la fierté des marchands de tabac.
Si
l'âge de la majorité culturelle et légale peut varier, la science est
désormais en mesure de déterminer les marqueurs physiologiques de la
maturité. Une récente étude réalisée par Jay Giedd, du National
Institutes of Health, à partir de clichés IRM (images à résonance
magnétique), montre que le cerveau
[AnatHum | McGill] d'un individu de 18 ans n'est pas
entièrement développé: les structures du
cortex limbique
[AnatHum], le
cervelet
[AnatHum]
et le
cortex préfrontal connaissent encore des modifications
substantielles.
Au 31 mars dernier, l'armée américaine comptait
81 000 adolescents [de moins de 20 ans] - dont 7350 jeunes âgés de 17
ans qui ont eu besoin de l'autorisation de leurs parents pour
s'engager. Ce n'est qu'en avril que les zones de combat leur ont été
interdites.
Mais l'armée vise encore plus jeune: par des films
multimédias, en intervenant dans les écoles et en faisant du démarchage
téléphonique à domicile et sur téléphone portable, elle touche des
enfants âgés parfois de 13 ans à peine. Dans les Junior Reserve Officer
Training Camps (JROTC), les gamins enfilent un uniforme, gagnent des
médailles, tirent à balles réelles et jouent au soldat tandis que des
adultes formés à la manipulation psychologique les orientent vers
l'armée. Le site Internet du JROTC de l'armée de terre regroupe ces
activités motivantes sous les termes "repas pris à des camionnettes de
ravitaillement".
Il est indispensable d'avoir un cortex
préfrontal - la zone du raisonnement - entièrement développé non
seulement pour décider de s'engager, mais aussi pour faire des choix
dans le stress du déploiement militaire et la terreur des combats. Or
le cortex préfrontal, "qui joue un rôle fondamental dans le contrôle
des
pulsions
[Dicopsy], est l'une des dernières régions du cerveau à arriver à
maturité" et n'atteint pas "sa taille adulte avant l'âge de 20-22 ans",
explique Giedd.
Le cerveau des adolescents ne possède tout
simplement pas de système de contrôle des pulsions susceptible
d'empêcher une vie de handicap psychologique et physique et des morts
évitables - la leur, celle de leurs camarades et celle de civils.
Si
l'armée américaine, comme d'autres armées, cherche à séduire les
jeunes, c'est parce qu'elle a besoin de chair à canon. En 2002, près de
la moitié des soldats du corps des marines avaient 17 ou 18 ans. Selon
une étude réalisée par le Pentagone, "chez les hommes comme chez les
femmes, la propension [à s'engager] est la plus forte parmi les
individus âgés de 16 et 17 ans". Cette "propension" décline rapidement
avec l'âge.
En 2004, selon les chiffres du Pentagone, 69 000
jeunes âgés de 16 à 17 ans, et 73 000 de 18 ans avaient demandé à
s'engager dans le service actif. Le chiffre passait à 49 000 pour la
tranche des 19 ans et n'était plus que de 9700 pour celle des 24 ans.
Le
ministère de la Défense
[USDef] consacre plus de 4 milliards de dollars par an
au recrutement, dont 1,5 milliard à la communication; 22 000 personnes
travaillent au recrutement. Le manuel du recruteur expose des
techniques de séduction malsaines qui possèdent toute la subtilité de
la traque effectuée par un prédateur. Les recruteurs, des adultes doués
pour "donner une impression de crédibilité" rôdent dans les cafétérias,
installent des ordinateurs portables et passent des vidéos bourrées
d'action tout en promettant amitié et conseils paternels. Comme les
Noirs sont particulièrement sceptiques vis-à-vis de l'effort de guerre,
le marketing de l'armée vise avant tout les Latinos à coup de campagnes
agressives de plusieurs millions de dollars.
Les recruteurs
discutent de leurs cibles avec les mères concernées et vont à l'église.
Ils convainquent des parents non anglophones de signer l'autorisation
d'engagement de leur enfant mineur en leur faisant croire que le
service militaire est obligatoire ou que le document en question n'est
qu'une autorisation de procéder à des tests sanguins, relate The New
York Times.
Les recruteurs s'efforcent également de convaincrent les
conseillers d'orientation des lycées en proposant "des visites guidées,
des voyages VIP (une journée dans la peau d'un marin) ou des ateliers". ■ Terry J. Allen
Compléments:
enfants soldats
[BouSaana | Checkpoint | Diplo | Libé | ONU | UNICEF | Childsoldiers]
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