La grandeur de
Hugo présente un paradoxe assez difficile à digérer: le plus fameux de tous les écrivains français est aussi celui qui offense le plus agressivement le goût français. Le génie de ce pays vise essentiellement à la mesure, à la clarté et à la perfection. Or Hugo est excessif, brumeux et déséquilibré.
Dans une tradition qui prise par-dessus tout l'ordre, l'harmonie et le sens des proportions, Hugo est venu planter la tente bariolée de son musée ambulant des horreurs: un cirque de cauchemar plein de bossus, de colosses, de nains et de monstres divers, avec des combats à mort contre des crocodiles et des pieuvres géantes, sur une toile de fond d'égouts, de ruines gothiques, de nuits de tempête, d'incendies, de raz-de-marée et de naufrage... La folie qui l'accompagna toute sa vie - son frère et sa propre fille finirent tous deux internés dans un asile d'aliénés - transparaît en filigrane partout dans son œuvre
[Gallica]. ■
Commentaires