Le Courrier, 18 mars 2008
[Pour Patricia McCulloch, psychologue, formatrice indépendante et auteur de livres et articles
sur les difficultés scolaires,] la scolarité d'un enfant est avant tout son affaire, sa responsabilité, ce qui ne veut pas dire que les adultes ne doivent pas s'impliquer: la responsabilité des parents est de créer et de maintenir quelques conditions qui soutiennent l'évolution scolaire et personnelle de l'enfant et sa progressive prise d'autonomie. Espérer pour lui, croire en lui, lui montrer intérêt et soutien en tant que parent, qu'il sente que ces derniers sont à ses côtés, reconnaître ses difficultés et ses découragements, l'aider lorsqu'il en a besoin, tout en lui faisant comprendre que sa scolarité est fondamentalement sa responsabilité, que
ses parents ne vont pas la faire à sa place.
L'intérêt porté par les parents sur l'évolution scolaire de leur enfant fait partie des conditions favorisant l'apprentissage. Il est évidemment essentiel de s'intéresser à ce que fait l'enfant à l'école, avoir un œil sur les devoirs – tout en considérant que les devoirs sont un contrat entre l'enfant et l'enseignant – et ainsi signifier à l'enfant qu'on s'attend à ce qu'il respecte son contrat vis-à-vis de l'enseignant. Il s'agit de lui signifier qu'on l'aidera, si nécessaire et dans la mesure de nos moyens, mais que l'essentiel est de sa responsabilité.
Il est souvent bénéfique de «ritualiser» les devoirs, c'est-à-dire que le
moment, le lieu, la durée... soient plus ou moins les mêmes d'un jour à l'autre. Les enfants bénéficient d'un certain nombre d'habitudes qui apportent de la stabilité à leur quotidien. Patricia McCulloch met en avant l'importance d'une grande clarté concernant ce qu'on attend de l'enfant, ainsi que le fait de se centrer sur le positif, de féliciter l'enfant pour ses réussites et ne pas se focaliser sur ses échecs.
Les parents doivent être capables de laisser l'enfant prendre sa part de responsabilité dans sa scolarité. À ce propos, la psychologue éclaire le paradoxe de l'aide dans lequel nous pouvons souvent rentrer en tant que parent avec nos enfants. En effet, on essaie d'aider l'enfant et plus on essaie de l'aider, plus on rentre dans une interaction négative qui, en plus d'être éprouvante pour tout le monde, peut, à court ou à moyen terme, déresponsabiliser l'enfant et le rendre dépendant de notre aide. Pour en sortir, il est utile tout d'abord de rappeler à l'enfant sa responsabilité
vis-à-vis de ses devoirs et lui préciser que l'on ne va plus «danser cette danse-là» avec lui. Il ne s'agit pas pour le parent d'être détaché, mais d'offrir une autre qualité de présence et de se dégager de l'interaction problématique avec l'enfant, tout en lui explicitant clairement ses attentes en tant que parent.
Il peut être utile de rencontrer l'enseignant. D'une part, pour savoir précisément ses attentes et exigences pour les devoirs de l'enfant et, d'autre part, pour voir si, de son point de vue, l'enfant présente une difficulté particulière pour laquelle il pourrait éventuellement bénéficier d'une aide (appui, logopédie...).
Patricia McCulloch rappelle que «l'école, c'est l'école, la famille, c'est la famille» et qu'il est indispensable de bien différencier les deux choses. En effet, la reconnaissance et le respect des territoires école/famille, et donc des responsabilités différentes, est très important. Patricia McCulloch met en avant aussi d'autres conditions favorables, comme entretenir avec les enseignants la relation la plus positive possible: par exemple ne pas dénigrer
l'enseignant: s'il y a un différend avec lui, une critique à lui faire, s'adresser directement à l'enseignant, soutenir ce qui se passe à l'école auprès de l'enfant, se rendre aux réunions de parents...
De même, il est important de garder en tête le fait que si l'enfant a une difficulté à l'école, cela ne veut pas dire que le parent est responsable ou coupable. Si un enseignant est préoccupé par un enfant, il est utile de considérer que sa préoccupation est certainement légitime et qu'il est aidant de chercher à comprendre quel est le problème du point de vue de l'enseignant, ce qu'il attend de l'enfant, ce qu'il peut faire lui-même pour résoudre le
problème, ce qu'on peut faire en tant que parent ou encore s'il pense qu'il serait judicieux d'entreprendre d'autres mesures pour atténuer le problème.
Patricia McCulloch rappelle également que le temps de la famille ne doit pas être envahi par l'école et que les relations parents-enfants ne tournent pas uniquement autour des devoirs et de l'école. Il est important que l'enfant ait autre chose dans sa vie que l'école, entre autres des copains et des activités... ■ Sybil Schaller et Catherine Vionnet
Lire: C. Curonici, F. Joliat, P. McCulloch, Des difficultés scolaires aux ressources de l'école. Un modèle de consultation systémique pour psychologues et enseignants, De Boeck, Bruxelles, 2006
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