Online. Bulletin spécial du Credit Suisse, janvier 2006
La première transmission de signaux sur des lignes électriques, réalisée par l'Américain
Samuel Finley Morse en 1837, marqua une étape importante dans l'histoire de la
communication. À partir de là, on n'était plus très loin de l'invention du
téléphone, dont le principe fut imaginé en 1854 par le Français
Charles Bourseul et mis au point en 1876 par l'Américain
Graham Bell. L'
alphabet morse conserva pourtant son importance en radiocommunication maritime jusqu'en février 1999. Supplanté peu à peu par les techniques de transmission modernes, il est devenu une espèce de code secret utilisé par les radioamateurs et les adolescents. En mai 2004, cependant, après plus de soixante ans sans aucun changement, le code morse international a été enrichi d'un nouveau caractère, le symbole @, qui s'écrit comme A et C, sans espace (.--.-.).
Bien avant l'invention du morse, les
Indiens d'Amérique du Nord utilisaient pour communiquer à distance un langage similaire, les signaux de fumée, qu'ils produisaient à l'aide d'un feu de bois vert et d'une couverture. Des messages pouvaient également être transmis selon la manière dont un cavalier, situé à un endroit bien visible, décrivait un grand cercle avec son cheval, faisait des allers-retours au galop ou montait sur une colline. Parallèlement, les Indiens inventèrent un moyen permettant la communication par gestes entre les différentes tribus, car les migations incessantes avaient entraîné en Amérique une diversité de langues qui n'a jamais existé ni en Asie ni en Europe.
Les signaux de fumée, qui furent utilisés aussi à des fins militaires dans l'ancienne Chine et dans l'Antiquité européenne, ont survécu jusqu'à nos jours. Dans l'Église catholique, les cardinaux chargés d'élire un nouveau pape se réunissent en conclave et font connaître le résultat du scrutin par des signaux de fumée. Une fumée noire s'échappant de la cheminée annonce un vote non concluant, une fumée blanche signifie:
«habemus papam».
Les Indiens, pour en revenir à eux, ne développèrent une
langue écrite qu'au début du XIXe siècle, avec l'alphabet
cherokee, mélange de lettres latines et de caractères inventés par un chef indien nommé
Sikwayi (Sequoyah). Mais quel peuple connut d'abord une langue écrite? Les recherches nous mènent en Mésopotamie, le pays situé entre deux fleuves, le Tigre et l'Euphrate.
C'est ici qu'au milieu du IIIe millénaire avant J.-C., les
Sumériens inventèrent une
écriture cunéiforme,
idéographique, où chaque signe correspondait à un mot. Plus tard, cette écriture passa du stade
pictographique au stade
syllabique quelques signes représentant le son d'une syllabe. Le premier texte littéraire de l'humanité, l'
Épopée de Gilgamesh, décrit les exploits du roi de la cité sumérienne d'Uruk,
Gilgamesh (vers 2652-2602 avant J.-C.), qui était deux tiers dieu et un tiers homme.
L'
akkadien, première langue diplomatique
Peu de temps après, toujours en Mésopotamie, apparut la langue akkadienne (du nom de la ville d'Akkad), une langue dotée d'une écriture syllabique entièrement développée. L'akkadien devint la langue écrite de la diplomatie dans tout l'ancien monde oriental.
Mais le système d'écriture le plus célèbre est sans conteste celui des
hiéroglyphes
[Wikipédia] de l'Égypte ancienne. Littéralement «gravures sacrées», les hiéroglyphes sont presque aussi anciens que les caractères de l'écriture
sumérienne, mais se distinguent fondamentalement de ces derniers, notamment par l'absence de voyelles. L'ambiguïté qui en résultait donna naissance à un système combinant trois catégories de hiéroglyphes: les phonogrammes (signes-sons), les déterminatifs (signes-concepts) et les idéogrammes (signes-images). Une forme cursive des hiéroglyphes, l'
écriture hiératique, se développa parallèlement. Enfin, vers 650 avant J.-C., apparut une écriture encore plus cursive ayant perdu tout aspect iconique, le
démotique. Les hiéroglyphes conservèrent leur mystère jusqu'aux temps modernes. Après la découverte, pendant la campagne de
Napoléon en
Égypte, d'une
pierre sur laquelle les hiéroglyphes étaient traduits à la fois en grec et en démotique, près de la ville de Rosette, il fallut attendre 1822 pour que le Français
Jean-François Champollion réeussisse à les déchiffrer.
En avril 2005, le linguiste américain Toby D. Griffen apporta un nouvel élément au débat sur la plus ancienne langue du monde, parvenant pour la première fois à décrypter une phrase de l'écriture dite de
Vinca
[Néolithique | Wikipedia]. Ces signes avaient déjà été rencontrés en 1875 sans qu'on leur reconnaisse le statut d'écriture. Pourtant, on sait que la culture de Vinca était représentée entre 5400 et 4500 avant J.-C. en Serbie, en Roumanie occidentale, en Hongrie méridionale et en Bosnie orientale. «La déesse ourse et la déesse oiseau sont bien la déesse ourse», voilà ce que dit la plus ancienne phrase connue d'une langue humaine. Ce qui n'a pas beaucoup de sens à première vue fait référence aux origines du culte d'Artémis et à la fusion de la déesse ourse et de la déesse oiseau en une seule et même déesse, la déesse ourse.
Il est tout à fait concevable que, dans un proche avenir, d'autres symboles que ceux-ci puissent être déchiffrés et identifiés comme étant les éléments d'une écriture ancienne. On a d'ailleurs trouvé sur le site archéologique de
Caral, au Pérou, des cordelettes à nœuds datant du IIIe millénaire avant notre ère qui pourraient bien correspondre à des messages écrits. Chez les
Incas, des cordelettes similaires, les
«quipus», véhiculaient en effet des indications de quantités et de catégories (différenciées par des couleurs). On constate donc, dans les débuts de l'histoire de la communication humaine, l'émergence d'une nouvelle dynamique analogue à celle que connaît l'ère [de l'internet] aujourd'hui.
L'imprimerie ne perce pas en Chine
Mais revenons à une époque plus proche de nous. Au milieu du XVe siècle,
Johannes Gutenberg inventa l'imprimerie classique (typographie). La
Bible de Gutenberg
[HRC | British Library] fut réalisée entre 1452 et 1454 à Mayence.
Bien sûr, on pourrait contester à Gutenberg la paternité de cette invention. Car enfin, n'y avait-il pas en Chine, entre 1041 et 1048, un certain
Bi Sheng qui imprimait des textes à l'aide de caractères mobiles en terre cuite? Mais le grand nombre de caractères chinois fut une entrave au développement de la nouvelle technique dans ce pays.
En 1605, le plus ancien journal du monde,
«Relation», fut imprimé à Strasbourg par Johann Carolus et constitua pour beaucoup la première réolution des médias. La première carte postale pré-affranchie remonte à 1869, tandis que la pemière colonne publicitaire, appelée en allemand «Litfasssäule» du nom de son inventeur, l'imprimeur berlinois
Ernst Litfass, fut érigée le 1er juillet 1855.
Quant à [l'internet], abréviation de «Interconnected Networks», il a vu le jour dans la seconde moitié du XXe siècle, à partir du réseau
Arpanet (Advanced Research Project Agency), qui avait été créé en 1969 par le ministère américain de la défense pour relier entre eux les ordinateurs des universités et des centres de recherche et exploiter au mieux des capacités de calcul limitées.
Un Anglais invente le World Wide Web à Genève
Le développement [de l'internet] fut considérablement accéléré par le
World Wide Web (WWW), et notamment par l'apparition du premier navigateur Web graphique, appelé Mosaic, qui pouvait être téléchargé gratuitement. Le World Wide Web fut inventé à Genève par l'Anglais Tim Berners-Lee, qui travaillait au CERN (Conseil Européen pour la Recherche Nucléaire) et proposa en 1989 un projet basé sur le principe de l'hypertexte et destiné à faciliter l'échange d'informations entre les scientifiques à travers le monde.
[...] les sites Web se sont multipliés à l'infini. Par contre, le site d'origine,
http://info.cern.ch n'existe plus. Les «archéologues [de l'internet]» peuvent néanmoins descendre dans les profondeurs de l'histoire et en consulter une copie sur
www.w3.org/History/19921103-hypertext/hypertext/WWW/TheProject.html. Ce site explique notamment à quoi sert le World Wide Web, comment on peut se procurer un navigateur Web et comment on installe un serveur Web. [...] ■ Andreas Schiendorfer
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